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Le Chevalier Kadosh, 30ᵉ degré du Rite Écossais Ancien Accepté, figure parmi les hauts grades les plus marquants – et sans doute les plus controversés – de la franc-maçonnerie. Héritier de légendes templières, auréolé de symboles de vengeance et de justice, le Chevalier Kadosh occupe une place singulière au cœur de l’échelle maçonnique. Son histoire, jalonnée de débats et de réticences, reflète les tensions entre mémoire, mythe et quête spirituelle. Longtemps perçu comme un grade dangereux, voire subversif, le Chevalier Kadosh a pourtant fini par s’imposer comme un moment essentiel du parcours initiatique. Mais que signifie réellement ce grade ? Pourquoi suscite-t-il encore interrogations et débats ? Et comment comprendre aujourd’hui son rôle dans l’édifice symbolique de la franc-maçonnerie ?

Qu’est-ce que le Chevalier Kadosh en franc-maçonnerie ?

Le Chevalier Kadosh constitue aujourd’hui le 30ᵉ degré du Rite Écossais Ancien Accepté et figure au même rang dans le Rite de Memphis-Misraïm. Il appartient au cercle restreint des degrés dits « majeurs », ceux qui ne se transmettent pas seulement par communication mais exigent une cérémonie de réception complète. Dans la hiérarchie maçonnique du Rite Écossais Ancien Accepté, le Kadosh est considéré comme le plus haut degré initiatique, les trois suivants étant qualifiés de grades administratifs.

Contrairement à d’autres grades moins connus et moins pratiqués, le Kadosh frappe par sa réputation et son imaginaire. Dès son apparition au XVIIIᵉ siècle, il a été perçu comme un grade « chevaleresque », reliant la franc-maçonnerie à l’héritage supposé des Templiers. Il ne se limite pas à une instruction morale : il propose une vision du franc-maçon en justicier, dépositaire d’une mémoire blessée et porteur d’une mission. En ce sens, le Chevalier Kadosh incarne à la fois une figure historique et un archétype initiatique : celui qui, face à l’oppression, se lève pour défendre l’idéal de justice.


Quand et comment est apparu le grade Kadosh ?

Le Chevalier Kadosh apparaît vraisemblablement en France au milieu du XVIIIᵉ siècle, à une époque où les hauts grades foisonnaient et où chaque système cherchait à affirmer son originalité. Les deux plus anciens manuscrits connus datent de 1750. On y trouve déjà les éléments essentiels qui feront l’identité du grade dans les décennies suivantes : la légende templière, l’évocation d’un ordre injustement persécuté, le lien revendiqué avec la franc-maçonnerie. On y rencontre aussi des symboles rituels précis : le cordon noir, le poignard, le mot hébreu Nekamah — qui signifie vengeance —, ou encore l’échelle à deux montants et sept échelons, portant des mots hébreux.

L’Échelle mystérieuse des Kadosh

Cet ensemble place le Kadosh dans une catégorie particulière : il ne s’agit pas seulement d’un grade d’érudition ou de méditation morale, mais d’un rituel dramatique qui met en scène une mémoire blessée et une mission à accomplir. À travers lui, certains maçons du XVIIIᵉ siècle projettent l’idée que la franc-maçonnerie est l’héritière, et peut-être même la continuatrice, de l’Ordre du Temple aboli en 1312.

La naissance du grade doit donc se comprendre dans le contexte intellectuel du siècle des Lumières, où l’on contestait de plus en plus l’autorité de l’Église et de la monarchie. En créant le Kadosh, certains ateliers franchissaient une étape décisive : ils ne se contentaient pas de raconter une légende templière, ils affirmaient que cette légende pouvait devenir un chemin initiatique vivant, et même un programme d’action, qui pouvait envisager de se passer de la caution ecclésiastique et royale.


Pourquoi le Chevalier Kadosh est-il un grade controversé ?

Le caractère controversé du Chevalier Kadosh tient autant à son imaginaire qu’à son usage rituel. Dès son apparition, il se présenta comme un grade de vengeance. Le poignard brandi, le cordon noir passé de l’épaule gauche à la hanche droite et le mot Nekamah rappelaient que le récipiendaire se plaçait dans la lignée des Élus, les vengeurs d’Hiram. Mais cette fois, la cible n’était plus seulement les meurtriers du Maître légendaire : c’était l’oppression symbolisée par le trône et l’autel, incarnés par le roi Philippe le Bel et le pape Clément V, jugés responsables de la chute de l’Ordre du Temple.

Là réside l’origine des accusations portées contre ce grade. Dans certaines versions du XIXᵉ siècle, on allait jusqu’à demander au candidat de fouler au pied la couronne royale et la tiare pontificale. Ce geste n’était pas anodin : au plus fort des luttes anticléricales et républicaines, il traduisait la volonté de rompre avec les deux pouvoirs qui avaient longtemps dominé l’Europe. Pour les adversaires de la franc-maçonnerie, ce rituel devenait la preuve que les loges préparaient un complot contre l’Église et la monarchie.

De grade maçonnique, le Kadosh devint ainsi symbole d’insubordination. Pour certains, il incarna l’esprit de liberté et de justice. Pour d’autres, il représentait un danger politique et religieux. C’est cette ambivalence qui nourrit encore aujourd’hui son aura controversée, entre légende noire et idéal chevaleresque.


En quoi le Kadosh est-il lié à la légende des Templiers ?

Dès son origine, le grade de Chevalier Kadosh s’est appuyé sur la mémoire des Templiers. Ceux-ci, arrêtés en 1307 et condamnés en 1312, symbolisaient l’injustice d’une puissance conjointe du trône et de l’autel. En faisant du récipiendaire le vengeur de l’Ordre du Temple, les premiers rituels projetaient la franc-maçonnerie dans une filiation imaginaire : non pas la restauration effective des chevaliers au manteau blanc, mais la reprise de leur combat contre l’arbitraire.

Réception d’un Kadosh, illustration française du XIXe siècle 

Cette légende trouva un écho particulier au XVIIIᵉ siècle. Depuis la Renaissance déjà, certains érudits mettaient en doute les accusations portées contre les Templiers et soupçonnaient que Philippe le Bel avait surtout agi par cupidité. Mais personne, avant l’époque des Lumières, n’avait osé se réclamer directement de l’Ordre aboli. Dans un contexte de remise en cause des pouvoirs établis, cette audace devint possible.

Le Kadosh ne fut pas seul à revendiquer cet héritage. L’Ordre allemand de la Stricte Observance Templière, dont devait dériver le Régime Écossais Rectifié, affirmait détenir la succession directe des Templiers et visait même la restitution de leurs biens. Dans ces constructions, le Templier devenait à la fois le martyr de l’oppression et la figure d’un savoir caché : trésors, secrets alchimiques, initiation orientale.

Ainsi, le Chevalier Kadosh se présente comme une transfiguration maçonnique du Templier : non plus soldat du Christ, mais chevalier de justice, porteur d’une mémoire de persécution et d’une quête universelle.


Le Chevalier Kadosh : un grade d’Élu et de vengeance ?

Le Chevalier Kadosh s’inscrit dans la lignée des grades d’Élus. Daté de 1750, le manuscrit de Quimper (manuscrit 100 J 1623, Archives Départementales du Finistère) associe déjà dans une même trame la vengeance d’Hiram et celle des Templiers. Le message est clair : le Kadosh prolonge le geste de l’Élu des Neuf, mais il élargit le champ de la justice. Ce n’est plus seulement l’assassinat d’un Maître qui appelle réparation, c’est la condamnation d’un ordre tout entier, injustement frappé par le roi et par le pape.

Les symboles rituels traduisent cette continuité autant qu’ils la transforment. Le poignard n’est pas une arme d’apparat : il est remis au récipiendaire comme instrument d’action. Le cordon noir, porté en baudrier de l’épaule gauche à la hanche droite, évoque le deuil, mais aussi la mission. Par son orientation inversée, il se distingue du baudrier chevaleresque traditionnel, qui soutenait l’épée du combattant. Ici, le chevalier ne porte pas l’épée, mais le poignard : signe que son combat ne relève pas d’une guerre profane, mais d’une justice symbolique.

Le mot Nekamah, vengeance, souligne encore cette tension. Pris à la lettre, il pourrait conduire à l’excès d’une revanche sanglante. Mais les rituels ultérieurs invitent à dépasser ce sens premier pour y lire une exigence plus haute : réparer l’injustice universelle. L’échelle à sept échelons complète ce parcours : de degré en degré, le récipiendaire apprend que la véritable élévation n’est pas la haine, mais la fidélité à un idéal.


Comment les obédiences ont-elles accueilli le grade Kadosh ?

L’accueil réservé au grade de Chevalier Kadosh fut loin d’être unanime. Dans les années 1760, la Grande Loge de France — qui allait devenir le Grand Orient de France en 1773 — exprima une nette hostilité à son égard. Le caractère vengeur du rituel, ses allusions au trône et à l’autel, paraissaient difficilement compatibles avec une franc-maçonnerie soucieuse de respectabilité. Jean-Baptiste Willermoz, fondateur du Régime Écossais Rectifié, rejeta pour sa part le Kadosh avec horreur, comme il le fit pour les autres grades de vengeance. À ses yeux, un tel degré dénaturait l’esprit chrétien et spirituel qu’il voulait donner à l’Ordre.

La controverse ne resta pas cantonnée aux loges. À la Révolution, l’anticléricalisme et l’opposition à la monarchie donnèrent un nouveau relief au mythe templier. Mais cette légende devint vite une arme entre les mains des adversaires de la franc-maçonnerie. L’abbé Barruel, dans ses célèbres Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme (1797), accusa les loges d’avoir fomenté la Révolution française comme une vengeance des Templiers, accomplissant le programme du Kadosh. L’argument connut une large diffusion dans les milieux catholiques conservateurs du XIXᵉ siècle.

Ainsi, dès son apparition, le Kadosh plaça les obédiences devant un dilemme : fallait-il l’assumer comme un degré fort et signifiant, ou le tenir à distance pour préserver la respectabilité de l’Ordre ? Cette hésitation allait marquer son histoire tout au long du XIXᵉ siècle.


Quelle évolution du grade Kadosh aux XIXᵉ et XXᵉ siècles ?

Au XIXᵉ siècle, la pratique du Kadosh resta longtemps incertaine. En 1806, le Suprême Conseil de France, fondé deux ans plus tôt pour administrer le Rite Écossais Ancien Accepté, décida que le 30ᵉ degré ne serait conféré que par communication, c’est-à-dire sans cérémonie de réception. Cette mesure traduisait une méfiance persistante à l’égard d’un grade jugé trop dangereux par ses allusions à la vengeance et à l’affrontement avec les pouvoirs établis.

Il fallut attendre 1830 pour que deux Aréopages se mettent à pratiquer effectivement le rituel complet du Kadosh, bientôt rejoints par deux autres sous la Monarchie de Juillet. Le Second Empire vit également la création de deux Aréopages supplémentaires. Mais l’extension du grade demeurait limitée, signe que les réticences n’étaient pas levées.

La IIIᵉ République, marquée par l’anticléricalisme et l’enracinement des idéaux républicains, offrit un contexte plus favorable. Huit Aréopages de Kadosh furent créés, mais tous ne survécurent pas : en 1890, il n’en subsistait que cinq sur l’ensemble du territoire français. Même à cette époque, le Kadosh restait donc un degré important mais minoritaire, plus symbolique qu’amplement pratiqué.

C’est après la Seconde Guerre mondiale que le regard changea profondément. La persécution des francs-maçons aux côtés d’autres catégories de la population — Juifs, Tsiganes, résistants, opposants politiques — donna au grade un sens renouvelé. Le Kadosh fut alors interprété non plus comme un appel à la vengeance, mais comme l’expression de la lutte universelle contre l’injustice et l’oppression. C’est dans cette lumière qu’il s’imposa comme l’un des degrés majeurs du Rite Écossais Ancien Accepté.


Quelle est la signification initiatique du Chevalier Kadosh aujourd’hui ?

Au terme de son histoire, le grade de Chevalier Kadosh a connu une profonde transformation de sens. Là où les premiers rituels mettaient en avant la vengeance, les obédiences contemporaines privilégient une lecture initiatique centrée sur la justice. Le poignard, le cordon noir, le mot Nekamah, l’échelle aux sept échelons demeurent des symboles de mémoire et de combat, mais ils sont relus comme les signes d’une exigence intérieure. Le Kadosh n’appelle plus le franc-maçon à une revanche contre des ennemis désignés ; il lui demande de se reconnaître comme gardien de l’idéal de justice et défenseur des opprimés.

Armoiries des Chevaliers Kadosh

Dans les rituels actuels, le récipiendaire est invité à comprendre que son combat n’est pas celui de la haine, mais celui de la fidélité aux valeurs universelles de liberté et d’équité. Le Chevalier Kadosh est ainsi devenu une figure exemplaire : celle du maçon qui assume son engagement face à l’injustice, non par la violence, mais par la constance d’un idéal. 

Cette signification prend tout son relief lorsqu’on la compare au Chevalier Rose-Croix, au 18ᵉ degré du REAA. Lui aussi considéré comme un grade incontournable, le Rose-Croix conduit l’initié vers le pardon et la réconciliation, dans la lumière du Christ symbolique. Le Kadosh, plus tardif dans le parcours, l’appelle à prendre position face à l’oppression et à défendre activement la justice. Ces deux figures, loin de s’opposer, se complètent et dessinent ensemble le visage du maçon accompli.


Conclusion – La vocation du Chevalier Kadosh aujourd’hui

Le Chevalier Kadosh occupe une place singulière dans l’édifice maçonnique. Né au XVIIIᵉ siècle dans un climat d’effervescence rituelle et intellectuelle, il a porté dès l’origine une charge symbolique puissante, mêlant la mémoire d’Hiram et celle des Templiers. Controversé pour ses accents de vengeance, rejeté par certains, exalté par d’autres, il a longtemps divisé les obédiences et nourri les polémiques antimaçonniques. Mais l’histoire en a fait un degré incontournable du Rite Écossais Ancien Accepté.

Aujourd’hui, le Kadosh n’invite plus à fouler des couronnes ou des tiares. Il rappelle que le franc-maçon, dans sa progression initiatique, ne peut ignorer l’injustice. Le poignard qu’il reçoit n’est pas une arme de haine mais le signe d’un combat intérieur et universel : lutter contre l’oppression, affirmer la dignité de tout être humain, défendre sans trêve ni repos la liberté et la justice. Comme le dit l’instruction du 30ᵉ degré dans le Tuileur de Lausanne (1875), le Chevalier Kadosh est appelé à « combattre par tous les moyens et sans trêve ni repos toute injustice et toute oppression ».

Par Ion Rajolescu, rédacteur en chef de Nos Colonnes — au service d’une parole maçonnique juste, rigoureuse et vivante

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FAQ – Le Chevalier Kadosh

1. Qu’est-ce que le grade de Chevalier Kadosh en franc-maçonnerie ?

Le Chevalier Kadosh est le 30ᵉ degré du Rite Écossais Ancien Accepté et du Rite de Memphis-Misraïm. Considéré comme l’un des grades majeurs, il se transmet par une cérémonie complète. Il incarne l’idéal du maçon justicier, chargé de lutter contre l’oppression et de défendre la dignité humaine.

2. Pourquoi le Chevalier Kadosh est-il considéré comme controversé ?

Il est controversé car certains rituels du XIXᵉ siècle demandaient de fouler au pied la tiare pontificale et la couronne royale. Ce geste symbolique fut interprété comme un appel à la révolte contre l’Église et la monarchie. Pour les uns, il incarnait la liberté ; pour les autres, un danger politique et religieux.

3. Quels sont les symboles principaux du Chevalier Kadosh ?

Les symboles essentiels sont le poignard, instrument de justice, le cordon noir en baudrier de l’épaule gauche à la hanche droite, le mot hébreu Nekamah (« vengeance ») et l’échelle à sept échelons. Ensemble, ils rappellent que le Kadosh se tient entre mémoire de persécution et appel à l’élévation spirituelle.

4. Le Chevalier Kadosh est-il lié aux Templiers ?

Oui. Le Kadosh se réfère à la mémoire de l’Ordre du Temple, aboli en 1312, et présente les francs-maçons comme leurs héritiers spirituels. Il ne vise pas une restauration réelle, mais une transfiguration initiatique : le franc-maçon reprend symboliquement le combat des Templiers contre l’oppression et l’injustice.

5. Quand est apparu le grade de Chevalier Kadosh ?

Le grade apparaît en France vers 1750, dans un contexte où foisonnaient les hauts grades. Les plus anciens manuscrits montrent déjà la légende templière, le cordon noir, le poignard, le mot Nekamah et l’échelle. Il naît au siècle des Lumières, alors que l’autorité ecclésiastique et royale était de plus en plus contestée.

6. Qu’est-ce que le manuscrit de Quimper ?

Le manuscrit de Quimper conservé aux Archives Départementales du Finistère (manuscrit 100 J 1623) est l’un des plus anciens rituels du Kadosh. Il associe la vengeance d’Hiram et celle des Templiers, établissant un lien direct avec le cycle des Élus. On y retrouve les principaux symboles du grade. Ce document illustre la volonté précoce d’unir mémoire biblique et légende templière.

7. Comment le Chevalier Kadosh a-t-il évolué au XIXᵉ siècle ?

En 1806, le Suprême Conseil de France limita le 30ᵉ degré à une communication, preuve de méfiance. La pratique rituelle se développa timidement à partir de 1830. Sous la IIIᵉ République, huit Aréopages furent créés, mais beaucoup disparurent. En 1890, seuls cinq restaient actifs, signe d’une diffusion limitée.

8. Quelle est la place du Chevalier Kadosh dans le REAA ?

Dans le Rite Écossais Ancien Accepté, le Kadosh est le plus haut degré initiatique. Les 31ᵉ, 32ᵉ et 33ᵉ degrés sont administratifs. Comme le 18ᵉ degré Rose-Croix, il est incontournable. Mais là où le Rose-Croix enseigne le pardon, le Kadosh appelle à combattre l’injustice et à défendre activement la liberté.

9. Quelle est la signification du mot Nekamah dans le rituel du Kadosh ?

Nekamah signifie « vengeance » en hébreu. Il rappelle la filiation avec les grades d’Élus, centrés sur la punition des coupables d’Hiram. Dans le Kadosh, ce mot élargit la portée : non plus venger un individu, mais un ordre persécuté. Aujourd’hui, il est relu comme un appel à la justice universelle.

10. Quelle est la vocation initiatique du Chevalier Kadosh aujourd’hui ?

Aujourd’hui, le Kadosh n’appelle plus à la revanche mais à la justice. Le poignard et le baudrier rappellent que le maçon doit s’engager contre l’oppression. Ce degré invite à reconnaître toutes les victimes d’injustice et à leur être solidaire, faisant du Kadosh le chevalier de la justice universelle.


Retrouvez ici la retranscription complète de l’épisode pour ceux qui préfèrent la lecture ou souhaitent approfondir les échanges.

Podcast – Le Chevalier Kadosh

Le Chevalier Kadosh. Un grade majeur de la franc-maçonnerie, mais aussi l’un des plus controversés.

Trentième degré du Rite Écossais Ancien Accepté, présent également dans le Rite de Memphis-Misraïm, il appartient au cercle restreint des degrés qui ne se transmettent pas par simple communication, mais exigent une cérémonie de réception complète.

Dans la hiérarchie maçonnique, le Kadosh est considéré comme le plus haut degré initiatique. Les trois suivants, le trente et unième, le trente-deuxième et le trente-troisième, sont dits administratifs.

Contrairement à d’autres grades moins connus, le Kadosh frappe par sa réputation. Dès le dix-huitième siècle, il a été perçu comme un grade chevaleresque, reliant la franc-maçonnerie à l’héritage supposé des Templiers.

Il ne se limite pas à une instruction morale. Il propose une vision du franc-maçon en justicier, dépositaire d’une mémoire blessée et porteur d’une mission.

Quand et comment ce grade est-il apparu ? Le Chevalier Kadosh naît en France au milieu du dix-huitième siècle, à une époque où les hauts grades foisonnaient.

Les plus anciens manuscrits connus datent de mille sept cent cinquante. On y trouve déjà les éléments essentiels : la légende templière, l’évocation d’un ordre injustement persécuté, et des symboles précis comme le cordon noir, le poignard, le mot hébreu Nekamah, ou l’échelle à sept échelons.

Ce n’était pas un simple degré d’érudition, mais un rituel dramatique qui mettait en scène une mémoire blessée et une mission à accomplir. À travers lui, certains maçons projetaient l’idée que la franc-maçonnerie pouvait devenir l’héritière, et peut-être la continuatrice, de l’Ordre du Temple aboli en mille trois cent douze.

Pourquoi ce grade est-il controversé ? Dès l’origine, le Kadosh se présente comme un grade de vengeance.

Le poignard brandi, le cordon noir porté en baudrier de l’épaule gauche à la hanche droite, le mot Nekamah : tout cela plaçait le récipiendaire dans la lignée des Élus, les vengeurs d’Hiram.

Mais ici, la cible n’était plus seulement les meurtriers du Maître légendaire : c’était l’oppression symbolisée par le trône et l’autel, incarnés par Philippe le Bel et par Clément le Cinquième.

Dans certaines versions du dix-neuvième siècle, le candidat devait même fouler au pied la couronne royale et la tiare pontificale. Au plus fort des luttes anticléricales, ce geste signifiait clairement la rupture avec l’Église et la monarchie.

De grade maçonnique, le Kadosh devint alors symbole d’insubordination. Pour certains, il incarnait l’esprit de liberté et de justice. Pour d’autres, il représentait un danger politique et religieux.

Le Kadosh est aussi un grade d’Élu et de vengeance. L’un des plus anciens rituels, daté de mille sept cent cinquante et conservé à Quimper, mêle déjà dans une même trame la vengeance d’Hiram et celle des Templiers.

Le poignard devient le signe de cette double fidélité. Quant au baudrier noir, il reprend la forme chevaleresque, mais inversée. Traditionnellement, le baudrier d’un chevalier part de l’épaule droite vers la hanche gauche pour soutenir l’épée.

Ici, il descend de l’épaule gauche à la hanche droite pour porter le poignard. Ce renversement n’est pas anodin : il souligne que le Kadosh n’est pas un chevalier comme les autres. Son arme n’est pas l’épée du pouvoir, mais le poignard du justicier.

Comment les obédiences ont-elles accueilli ce grade ? Avec beaucoup de réserves. Dans les années mille sept cent soixante, la Grande Loge de France, future Grand Orient, se montra hostile au Kadosh.

Jean-Baptiste Willermoz, fondateur du Rite Écossais Rectifié, le rejeta avec horreur. Pour lui, un tel degré dénaturait l’esprit chrétien et spirituel qu’il voulait donner à l’Ordre.

Puis survint la Révolution. L’abbé Barruel accusa les francs-maçons d’avoir fomenté la Révolution comme une vengeance des Templiers, accomplissant le programme du Kadosh.

Ainsi, dès son apparition, ce grade plaça la franc-maçonnerie devant un dilemme : fallait-il l’assumer comme un degré fort, ou le tenir à distance pour préserver sa respectabilité ?

Son évolution au dix-neuvième siècle reste marquée par la méfiance. En mille huit cent six, le Suprême Conseil de France décida que le Kadosh ne serait conféré que par communication, sans cérémonie.

Il fallut attendre mille huit cent trente pour voir les premiers Aréopages pratiquer le rituel. Sous la Monarchie de Juillet, puis sous le Second Empire, quelques créations eurent lieu, mais de manière limitée.

C’est sous la Troisième République que le grade connut un développement plus marqué, avec huit Aréopages, dont beaucoup disparurent rapidement. En mille huit cent quatre-vingt-dix, il n’en restait que cinq en France. Le Kadosh restait symboliquement fort, mais minoritaire dans la pratique.

C’est au vingtième siècle, après la Seconde Guerre mondiale, que le sens du Kadosh s’est transformé. Il n’est plus lu comme un appel à la vengeance, mais comme une identification aux victimes de l’oppression. Les francs-maçons persécutés, aux côtés d’autres populations, ont donné un nouveau relief à ce grade. Le poignard n’est plus une arme de haine, mais le signe d’un combat intérieur et universel : défendre sans trêve ni repos la liberté et la justice.

Quelle est aujourd’hui la signification initiatique du Chevalier Kadosh ? Il appelle le franc-maçon à se reconnaître comme gardien de l’idéal de justice et défenseur des opprimés. Son combat n’est pas celui de la haine, mais celui de la fidélité aux valeurs universelles de liberté et d’équité.

Cette vocation prend tout son relief lorsqu’on la compare au Chevalier Rose-Croix, au dix-huitième degré du Rite Écossais Ancien Accepté. Lui aussi incontournable, le Rose-Croix conduit l’initié vers le pardon et la réconciliation, dans la lumière du Christ symbolique.

Le Kadosh, plus tardif, appelle à prendre position face à l’oppression et à défendre activement la justice. Ces deux figures, loin de s’opposer, se complètent et dessinent ensemble le visage du maçon accompli.

Le Chevalier Kadosh occupe ainsi une place singulière dans l’édifice maçonnique. Controversé pour ses accents de vengeance, rejeté par certains, exalté par d’autres, il a longtemps divisé les obédiences. Aujourd’hui, il rappelle que le franc-maçon, dans sa progression initiatique, ne peut ignorer l’injustice.

Comme le dit l’instruction du trentième degré dans le Tuileur de Lausanne de mille huit cent soixante-quinze : le Chevalier Kadosh est appelé à « combattre par tous les moyens et sans trêve ni repos toute injustice et toute oppression ».

06 octubre, 2025